L’avenir de la kiné passe par l’écrit

 

Depuis plus de 20 ans, la profession de Masseur-Kinésithérapeute ne cesse de gagner en autonomie : suppression du nombre de séances sur la prescription médicale, instauration du diagnostic kinésithérapique, création de l’Ordre, droit de prescrire du petit matériel, etc.

 

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La réforme de la formation initiale des masseurs-kinésithérapeutes de septembre 2015 consacre cette évolution en apportant des perspectives structurelles majeures [1,2].

Hissant la profession à bac + 5 années universitaires, soit au niveau Master, la réforme reconnaît au masseur-kinésithérapeute un haut degré de décision et de responsabilisation (niveau I de la nomenclature des diplômes) [3].

Les potentiels sont importants et d’abord au bénéfice du patient accompagné par un professionnel plus compétent et lucide des enjeux de santé dans lesquels il s’implique.

Mais il ne faut pas se leurrer : la plus-value qualitative ainsi escomptée oblige de fait un investissement qu’il n’est plus possible d’occulter : la réification des pratiques, c’est-à-dire la matérialisation de la prise en charge thérapeutique par l’écrit.

À l’époque où « ce qui n’est pas écrit n’existe pas » [4], les masseurs-kinésithérapeutes ne peuvent plus se satisfaire des quelques notes ou fiches de bilan, nécessaires mais insuffisantes parce que ne représentant que le cliché instantané – et donc partiel – d’un chantier en cours, qui ne présage ni relate la construction thérapeutique envisagée, là où justement s’exprime l’expertise professionnelle.

Si j’observe des données pertinentes d’ordre physique et/ou psychique, c’est écrit.

Si je diagnostique la problématique du patient, c’est écrit.

Si je contracte des objectifs thérapeutiques avec le patient, c’est écrit.

Si je réalise les actes répondant à ces objectifs, c’est écrit.

Et quels qu’en soient les résultats – satisfaisants ou non, ils sont écrits.

Une véritable ingénierie de l’écrit est à inventer, adopter, systématiser, en termes de supports et d’organisation. De formation. D’évaluation.

C’est un temps dédié qui fluidifie et accélère les transmissions.

C’est un effort qui simplifie et optimise les prises en charge.

C’est un dévoilement qui renforce les décisions et les propositions thérapeutiques.

C’est une difficulté qui fait progresser.

Et cette nécessité n’est pas restriction, mais bien opportunité.

Car, contrairement à ce que craint plus ou moins silencieusement la plupart des MK, dès qu’un kiné écrit sa pratique il la valorise.

Notamment par la finesse (précision) et la justesse (déduction) de ses propos, sachant que peu d’acteurs de santé peuvent se prévaloir d’une telle proximité des réalités du patient – proximité qui confère une indéniable caution de pertinence et de légitimité.

Garante de traçabilité, de transmissibilité, de confidentialité, de réflexivité, de conformité, d’exemplarité – en deux mots : de professionnalisme – la matérialisation de l’exercice de la Masso-Kinésithérapie par l’écrit repose sur des pratiques transparentes et objectives, s’inscrivant dans le cadre des obligations déontologiques de chacun [5].

En fait, la réforme entérine et encourage, si cela était nécessaire, la révolution écrite de la Masso-Kinésithérapie, socle et témoin de son émancipation.

Elle incite chacun à mieux assurer ses compétences, à mieux être.

Annexe :

L’Arrêté du 2 septembre 2015, relatif au diplôme d’État de masseur-kinésithérapeute [2], est librement téléchargeable – avec l’intégralité de ses annexes – en cliquant sur ce lien http://newMK.kinedoc.org

Références :
  1. République française. Décret n°2015-1110 du 2 septembre 2015 relatif au diplôme d’État de masseur-kinésithérapeute. JORF 4 septembre 2015. NOR : AFSH1516234D.
  2. République française. Arrêté du 2 septembre 2015 relatif au diplôme d’État de masseur-kinésithérapeute. Ministère des affaires sociales, de la santé et des droits des femmes ; JORF 0204, 4 septembre 2015. NOR : AFSH1516238A.
  3. Ministère de l’Éducation nationale, de l’Enseignement supérieur et de la Recherche. Nomenclature relative au niveau de diplôme. Juillet 2013. http://www.enseignementsup-recherche.gouv.fr/cid72872/nomenclature-relative-au-niveau-de-diplome.html
  4. Gedda M. Universitarisation à la française : les droites lignes de l’errance – Ou 25 années d’agitation sur place (Éditorial). Kinesither Rev 2014;14(152-3):1-4.
  5. République française. Décret n° 2008-1135 du 3 novembre 2008 portant code de déontologie des masseurs-kinésithérapeutes, Article R.4321-62, Titre I : Devoirs généraux des masseurs kinésithérapeutes. NOR : SJSH0807099D
Auteur :

Michel GEDDA

Directeur de l’IFMK Berck-sur-Mer

Rédacteur en chef de « Kinésithérapie, la Revue »

Déclaration d’intérêts :

L’auteur ne reçoit aucune rémunération ni gratification, directe ou indirecte, de Medicapp Connect.

Note :

Ce texte sera repris dans un prochain éditorial du mensuel « Kinésithérapie, la Revue », publication scientifique et technique des Éditions Elsevier-Masson.

http://www.em-consulte.com/revue/KINE/presentation/kinesitherapie-la-revue